De Fflflbciation des Iddes. LIV.) ll. 317

§. 6. Cette forte combinaifon d’Idées qui n’efl: pas cimentée par la Na- ture, FEfprit la forme en lui-méme, ou volontaircmcnt, ou par hazard; & de la vient qu’elle elt fortdilTéi-ente en diverfcs perfonnes felon ladiverfi- de leurs inclinations, de leur education , 6c de leurs interets. La cofi- tume forme dans l’Entende1nent des habitudes depenfer d’une certainema- niére, tout ainfi qifelle produit certaines determinations dans la Volonte’ , 8c certains mouvemens dans le Corps: toutes ‘chofes qui femblent n’etre que certains mouvemens continuez dans les Efprits animaux qui étant une fois portez d’un certain cote’, coulent dans les memes traces on ils ont ac- cofitumé de couler, lefquelles traces par le cours fréqtient dcs Efprits ani- maux fe changent en autant de chemins battus , de forte que le mouvement y devient aifé, & pour ainfi dire, nature]. Il me femble, dis-je, que dell: ainfi que les Idées font produites clans notre Efprit, autairt que nous fom- mes capables de comprendre ce que deft que penfir. Et elles ne font pas produites de cette maniére, celapeut fcrvir du moins it expliqtiercomnren-t elles fe fuivent l’une fautre clans un cours habituel , lorfqifelles ont pris une fois cette route, comme il fert aexpliquer de pareils mouvemensdu Corps. Un Muficien accofitumé a chanter un certain Air, le trouve des qu’il l’a une fois commence’. Les idées des diverfes notes fe fuivent l’une fautre dans fon Efprit, chactlne a fon tour, fans aucun effort ou aucune altera- tion, aufli régulierement que fes doigts fe remuent fur le clavier d’une Or- gue pour jofier l’air qu’il a commence , quoi que fon Efprit diftrait prome- ne fes penfées fur toute autre chofe. je ne determine point, le mouve- ment des Efprits animaux eft la caufe naturelle de fes idées, aufii bien que du mouvement régulier de fes doigts, quelque probable que la chofe pa- roiffe par le rnoyen cle cet exemple. Mais cela peut fervir un peu a nous donner quelque notion des habitudes intelleéttielles, 8c de la liaifon des Idées.

§. 7. ggil y ait de telles afiiociations d’Ide'es; que la cofitume a produi- tes dans l’ fprit de la plfipart des hommes , deft dequoi je ne croi pas que perfonne qui ait fait de ferieufes réfiexions fur foi-méme & fur les autres hommes, s’avife de douter. Et dell peut-etre a cela qu’on peut juftement attribuer la plus grande partie des fympathies & des antipathies qu’on re- marque dans les hommes; & qui agillient auffi fortement, & produifent des eifets aufii réglez, que elles étoient natnrelles, ce qui fait qu’on les nom- me ainli; quoi que d’abord elles n’ayent eu cfautre origine que la liaifon accidentelle cle deux Idées, que la violence d’une premiere imprefiion , ou une trop grande indulgence a f1 fort unies qu’aprés cela elles ont toujours été enfemble dans I’Efprit de l’Homme comme f1 ce n’étoit qu’une feule

"idée. ]e dis la plfipart des antipathies 8t non pas toutes: car il y en a quel-

ques-unes véritablement naturelles, qui dependent de notre confiitution originaire, & font nées avec nous. Mais f1 l’on obfervoit exaetement la plflpart de celles qui pafiient pour naturelles , on reconnoitroit qu’elles ont été caufées au commencement par des impreflions dont on ne sell: point ap- pergu , quoi qtfelles ayent peut-étre commence de fort bonne heure, ou

Rr 3 bien

CHAI’. XXXIII.

Comment f8

formic certe liaifon 7

Elle efl Y: Caufe de la plfipart des (vmpathies 8c antipathies, qui paffent pout uaturclles,