De: Mots on du Langztge m glnlral. LIV. III. 315
§. 3. Mais cela ne fuflifoit point encore pour rendre les Mots aufli utiles C H A ;»_ I, qn’ils doivent étre. Ce n’el't pas aflez pour la perfeeition du Langage que Les mo“ my,“ les Sons pnilTent devenir fignes des Idees, i1 moins qu’on ne puifiie (e fervir =9"? 4e 17am sé: de ces fignes en forte qu'ils comprenent pluficurs cliofes particulieres: car “mu” la multiplication des Mots en auroit confondulufage, s’il efit fallu un nom diftinet pour defigner chaque cliofe imrtictiliere. Afin de remedier a cet inconvenient, le Langage a ete encore perfeetionne par Fufiige cles termes
generaux , par ou un feul mot eft devenu le figne d’une multitude d'exil'-
tences particulieres: Excellent ufagc des Sons qui a ete uniquement pro~ duit par la difference des Idées dont ils font devenus les fignes ; les N oms a qui l’on fait fignifier cles Idees generalcs, devenant generaux; 8L ceux qui expriment des Idees particulieres, demeurant particuliers.
§. 4. Outre ces noms qui fignifient des Idees, il y a d’autres mots que les hommes employent, non pour lignifier quelque idee, mais le manque ou Fabfence d’une certaine idee fimple ou complexe, on de routes les idees enfemble, comme font les mots, Rim, ignorance , 8c fiéri/ize’. On ne peut pas dire que tous ces mots negatifs ou privatifs nappartiennent proprement a aucune idee,ou ne fignifient aucune idee, car en ce cas-la ce feroient des Sons qui ne fignifieroient abfolument rien : mais ils fe rapportent a des Idees pofitives, 8c en defignent Yabfence.
§. 5. Une autre chofe qui nous peut approcher un peu plus de Vorigine ‘If "{°"$_§i_1=n@_ de toutes nos notions & connoiflances , deft dbbferver combien les mots gaiigifiillifnféii; dont nous nous fervons, dependent des idees fenlibles, & comment ccux ‘lljéeigféilfifé‘ff‘“ qu’on employe pour fignifier des aetions 6c des notions tout-a-fait eloignees " a" des Sens, tirent leur origine cle ces memes Idees fenfibles, d’ou ils font transferez a des fignifications plus abftrufes pour exprimer des Idees qui ne tombent point fous les Sens. Ainfi, les mots fuivans imziginer, compremlre, fattaaher, conrevoir; infiiller, rlégoziter, trouble, mmquil/ité, &c. font tous empruntez des operations de chofes fenfibles , 8c appliquez a certains Modes de penfer. Le mot Eflorit dans fa premiere tignification, dell le fizzqfle; & celui dDfnge fignifie Meflhger. Et je ne doute point qne, fi nous pouvions conduire tous les mots jnfqifa leur fource, nous ne trouvafl fions que dans toutes les Langues , les mots qu’0n employe pour llgfllfitl’ des chofes qui ne tombent pas fous les Sens,ont tire leur premiere origine d’Idées fenfibles. D’oi1 nous pouvons conjeeturer quelle forte de notions avoient ceux qui les premiers parlerent ces Langues-la, d’oi1elles leur vc- noient dans PEfprit, & comment la Nature fuggera inopinement aux horn- mes Forigine 8c le principe de routes leurs connoilTances ,par les noms me‘
. mes qu’ils donnoient aux chofes ;puil'que pour trouver des noms qui puflient
faire connoitre aux autres les operations qu’ils fentoient en eux-memcs , ou quelque autre idée qui ne tombat pas fous les Sens, ils furent obligez d’em- prunter des mots , des idees de fenfation les plus connues , afin de faire con- cevoir par-la plus aifement les operations qu’ils eprouvoient en eux-mémes, &qui ne pouvoient étre reprefenitees , par des apparences fenfibles & exte- rieures. Aprés avoir ainfi trouve des noms connus 8c dont ils convenoient
mutuellement, pour fignifier ces operations interieures de llEfprit , ils pou- S f 2 voicnt