2o septembre 1916.

Ma chere, trés chére Soeur,

Tu vois, je tiens mes promesses et je commence désnmaintenant a fécrire mes impressions de voyage.

Nous sommes partis le 15 au matin de la gare du quai d'Orsay. Le compartiment était complet : un professeur de lycée, sa femme, cinq permis- sionnaires et le <( Trio ». Nous fimes causer les soldats, vrais montagnards du Béarn, qui allaient passer huit jours chez eux et embrasser leur femme et leurs gosses.

Ils nous racontaient leur vie de poilus tout en mangeant une bonne omelette aux poivrons, conservée dans une vieille boite de chez (( Amieux », sans oublier de se passer de temps en temps l'outre de peau de chévre remplie du traditionnel << pi- nard ».

Ils buvaient (( a la régalade », comme tous les paysans pyrénéens, et: cela m'amusait. Oh! les braves gens !

Les étrangers qui viennent chez nous ne connais- sent pas la France tant qu'ils n'ont pas appris a connaitre le Paysan. Qu'il soit breton, normand, gascon, poitevin ou provengal, le paysan frangais montre toujours les mémes qualités d'endurance, de bon sens et d'épargne.