384 LE ROMANTISME DES CLASSIQUES
comme le dit M. Havet, « le châtiment du re- mords traduit cu spectacle 1 ››.
Lorsque le poète dramatique trouve moyen d'in- téresser cn même temps les deux plus grandes puissances de Pâme humaine, Fimagination et la conscience, il s'empare de Fhomme tout entier: car il rend visible à la foule, aux enfants eux- mémes, l'idée de la justice, par laquelle invincible- ment nous concevons la nécessité d`un châtiment pour le mal volontaire, et invinciblement aussi la nécessité d'une récompense pour le bien courageu- sement et obstinément accompli. Ah! si, comme le prétend une certaine philosophie, ce n'est là qu'une illusion, si la justice n'existe pas réellement en dehors de cette conception de notre esprit, si la justice éternelle n'est qu"un rêve, Fhomme lui-même, en faisant un tel rêve, ne semble-t-il pas un être presque divin? Il y a quelque chose qui nous échappe, et qui ne peut faire autre- ment que de nous échapper, puisque Fhomme, étant un être fini, ne saurait comprendre Pinfini; cependant, lors même que la justice nfexisterait pas, Phomme qui la conçoit la crée. En aspirant à sortir de lui-même, il s'élève du moins aussi haut que le comporte la nature d'un être borné dans Fespace et dans le temps, qui, ayant commencé, doit finir. Cet effort, cet élan de notre pensée,ce coup d'aile vers Finfini, est ce qu'on nomme Pidéal : un
l. Le Christáanisnze et ses Origines, tome 1. . 86.